Lettre 22 - 14/10/2002

Après une année d’interruption, nous reprenons la publication des Lettres Trimestrielles des Artisans de Paix. Celle-ci, la 22è, sera aussi le Rapport Moral de notre Association présenté à l’Assemblée Générale Ordinaire du 13 novembre 2002.

Ces Lettres étaient l’œuvre de notre Fondatrice, Madeleine FRAPIER, qui s’est endormie dans l’Espérance de la Résurrection le 25-26 janvier dernier. Elle aurait eu 100 ans le 2 octobre 2002. Elle avait été marquée par les grands évènements du 20è siècle et avait à son tour voulu transmettre à son prochain sa Foi et son Espérance dans le message divin révélé à l’humanité au Mont Sinaï. La création de l’Association « Artisans de Paix » fut la dernière et très riche réalisation de sa longue vie de croyante engagée dans son siècle au service des autres, au nom de la Loi divine de justice et d’amour.

Cette année qui vient de s’écouler est encadrée par les deux violences inouïes du 11 septembre 2001 à New York et du 12 octobre 2002 à Bali. Entre ces deux dates sanglantes, combien d’autres violences et attentats suicides et combien de victimes. Les criminels qui ont perpétré ces actes et en annoncent d’autres sont répudiés par les plus hautes instances religieuses de la communauté dont ils se réclament ; ils s’inscrivent dans une logique de la violence qui se propage en Europe (Irlande du Nord, Balkans, Espagne..), en Afrique (Algérie, Nigéria, Soudan, Congo, Côte d’Ivoire…), en Amérique centrale, au Cashmire, en Indonésie, au Sri-Lanka et qui se poursuit au Proche-Orient sur les lieux mêmes de la Révélation faite aux Peuples du Livre.

Devant ces violences et les germes de violences accrues, voire de guerres, qu’elles engendrent, les Artisans de Paix doivent d’abord se garder de se laisser contaminer par un esprit de peur ou de haine à l’égard des auteurs de ces crimes : la peur entraine à des actes irréfléchis et la haine alimente la violence. Ensuite, secourir les victimes, par la compassion exprimée et l’aide matérielle apportée – et sur ce dernier point, force est bien de constater que les structures étatiques et caritatives sont bien peu actives. Les premières visent avant tout à rechercher et châtier les coupables, les secondes habituées à secourir les victimes des catastrophes naturelles, semblent prises de court devant les victimes du terrorisme. Enfin, nous, Artisans de Paix, devons inlassablement rappeler et mettre en pratique le commandement que nous avons reçu : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ».

Au cours de cette année, depuis notre Assemblée Générale Ordinaire du 4 décembre 2001, nos rencontres se sont poursuivies sur le thème retenu pour 2002 : « Devenir artisan de paix entre les nations », selon le programme mis au point par notre Vice Présidente, Paula ROLLAND-KASPARIAN et daté du 22 novembre 2001 et animé par elle avec constance et passion.

–  Quatre week-ends à la Maison sur le Monde à Mazille, près de Cluny :

> En janvier, sur le défi de la différence : différence sexuelle (Alain-Didier WEIL, psychanalyste et écrivain) ; différence Isarel/Nations (François MARTY S.J., philosophe) ; différence entre les religions et les cultures (Khaled ROUMO, professeur de lettres).

> En mars, sur le défi de l’Europe : le sens d’un nom (Dominique BERTRAND, musicien-troubadour) ; un nom qui oblige à œuvrer pour la paix (Emile MOATTI, délégué général de la Fraternité d’Abraham) ; une paix qui s’enracine dans la symbolique du Sinaï (Edmond LISLE, économiste) ; la participation de l’Islam au génie de l’Europe (Hassan AMGHAR, imam).

> En mai, sur le défi de Jérusalem : le regard juif d’un résidant actuel (Marc-Alain OUAKNIN, rabbin et philosophe) ; le regard chrétien d’un ancien résidant (Claude GEFFRÉ O.P. théologien) ; le regard musulman d’un vice-président d’Artisans de Paix (Ghaleb BENCHEIKH, physicien).

> En novembre, sur le défi de Paul : le regard d’un psychanalyste juif réfléchissant sur les trois monothéismes (Daniel SIBONY, psychanalyste et écrivain) ; le regard d’un disciple de Paul relisant sa tradition particulière à la lumière de l’Un et l’Autre Testaments (François MARTY S.J., philosophe) ; le regard d’un Musulman relisant sa tradition particulière à la lumière du Tryptique de l’Alliance – Tora, Evangile, Coran (Hassan AMGHAR, imam).

Chaque week-end était scandé par des temps de prière ou de célébration juive, chrétienne et musulmane, sans syncrétisme, chaque tradition écoutant la prière de l’autre dans le respect et le recueillement. Au cours de chacun de ces week-ends nous avons eu la joie d’entendre la belle voix de Mitchelée, chanteuse.

–  Trois conférences à Paris, pratiquant l’hospitalité inter-religieuse :

> En février, à la synagogue Chasseloup-Laubat : conférencier musulman, Ghaleb BENCHEIKH, Dr.ès Sciences : Prolégomènes pour un mieux-vivre ensemble.

> En avril, à la salle paroissiale de Saint Sulpice : conférencier juif, le Professeur Raphaël DRAI : Hommage rendu à la pertinence de l’œuvre de Paul Beauchamps, dans la perspective d’un mieux-vivre ensemble des Juifs et des Chrétiens, pierre angulaire de la construction européenne.

> En juin, à la Grande Mosquée de Paris : dialogue entre Musulmans, Chrétiens et Juifs: Unité et diversité des langues, silence et paroles partagées : quelles sont les conditions de la médiation ?

Ces rencontres, spirituellement et intellectuellement denses et pleines de chaleur et d’amitié, témoignaient de la volonté de notre Association de constituer ce « Peuple en marche » incarnant  l’esprit du Sinaï. Pour l’avenir, nous avons l’ambition de les tenir, non seulement en Europe, mais également en terre d’Egypte, au Sinaï, selon le projet originel de Madeleine FRAPIER.

Edmond LISLE, Président