Lettre 54 - 26/1/2012


Se hisser au niveau de la nature… Hisser la pensée au niveau de l’existence…



Nous avons célébré l’horizon de notre accomplissement, l’Unité des Artisans de Paix, le 25 janvier dernier, dans la vérité et la chaleur de l’amitié. L’assemblée eucharistique fut présidée par Jacques Cusset (père blanc). Ses premiers mots furent pour l’Eglise de Syrie actuellement martyrisée. Il a rappelé que c’est aux portes de Damas que Saül de Tarse fut inondé de la Lumière du Seigneur et qu’avant de signifier « œcuménisme », OIKOUMENEE signifie « habiter la terre entière ».

La terre avait semé bien des embûches sur le chemin de notre célébration, chacune fut l’occasion d’une grâce. Cette transmutation des énergies est pour les Artisans de Paix, le premier sens de cette proposition d’ « habiter la terre entière », de telle sorte qu’OIKOUMENEE signifie aussi « conversion ». C’est une façon pour les Chrétiens d’ « annoncer la Parole »  et pour l’ensemble de l’humanité de « se hisser au niveau de la nature » dont Dan Arbib nous a rappelé qu’elle était bonne.

Patrick Lecouve sss qui devait nous recevoir à la Chapelle du Saint Sacrement fut appelé en mission à l’étranger. Ce fut pour nous l’occasion de célébrer au siège social de notre Association, dans le Souffle des premiers Chrétiens. Mgr Philippe-Marie (Métropolie en Europe de l’Église-mère Syrienne Orthodoxe Malankare) avait souhaité être des nôtres mais au moment de notre célébration il était « au fond du lit terrassé par une mauvaise fièvre ». Il nous assure qu’au moment où nous célébrions la Sainte Messe, la Liturgie (Qurbana) était célébrée au Monastère Syriaque N-D de Miséricorde de Chandai  (Normandie) par Abouna Charbel-Marie   pour notre Association et en mémoire de Madeleine Frapier retournée au Père dans la nuit du 25 au 26 janvier 2002. Se sont unis à nous par la prière, les pasteures Florence Blondon et Béatrice Hollard-Beau, François Marty sj, Malick Diawara,  Lama Guetcheu (terrassé lui-aussi), Vincent Pilley (en province) et Tarik Bengaraï qui baptisait ce 25 janvier dans la tradition musulmane, sa fille Inès née le 18.1.12 sous le signe de l’Unité.

Que de chemin parcouru depuis le 25 janvier 1935, date à laquelle le père Couturier fonda la Semaine de Prière des Chrétiens pour l’Unité, en l’inscrivant dans la tradition de l’Octave des saints apôtres Pierre et Paul (18-25 janvier) qui avait été choisie en 1908 par le père Paul Watson et confirmée en 1909 par le pape Pie X. Dans une humilité profonde, le père Couturier ne voulait qu’une chose : « qu’arrive l’Unité visible du Royaume de Dieu telle que le Christ la veut et par les moyens qu’il voudra ». Sans doute n’avait-il pas imaginé la visibilité que prend aujourd’hui l’Unité du Royaume de Dieu pour les Artisans de Paix que nous espérons être…

Aujourd’hui, la présence de Dan Arbib parmi nous manifeste que l’Unité à laquelle aspirent les Chrétiens séparés est plus vaste qu’eux-mêmes pris dans leur ensemble. Le chemin spirituel qu’ont entrepris les Artisans de Paix leur fait réaliser que l’Unité en question est aussi plus vaste que l’ensemble des traditions religieuses de leurs membres. Elle est l’Unité du cosmos tout entier dont la Nature est Verbe dès lors que pour eux, la finalité est la pleine manifestation de “Dieu, tout en tous”. Tout dans la création chante la Gloire de Dieu. Nous sommes au cœur de la Révélation de Saül de Tarse dont nous fêtons la conversion le 25 janvier, jour de la fête de notre Unité.

Sur le chemin de Damas, Saül tomba à terre et devenant aveugle au monde, il vit sa face cachée faite de Lumière et de Verbe. Il y reconnut le Verbe qui est au Commencement : « Béréshit » tandis que pour lui, s’accomplissait la fin des temps. Pour lui, le Messie se présenta en lui et en Ananie, afin que Saül devienne son messager auprès des nations sous le nom de Paul. Paul considérait que le fait que tous les Juifs ne reconnaissent pas en Jésus le Messie fait partie du mystère de la Révélation, donc de la Grâce.  L’Unité cosmique qu’annonce Paul en Christ ne peut se réaliser que par la bénédiction mutuelle que sont appelés à se donner tous les peuples de la terre, à commencer par les Juifs et les Chrétiens, dans le respect total de leur altérité  (Romains 9).

Ce 25 janvier 2012, nous entendîmes très fort cet appel. Si l’on écoute les mots habituels de l’Eglise avec des oreilles juives, on trouve matière à être blessé. Dan a pu l’être au cours de notre célébration, sans que nous ne le voulions.  C’est que nous n’étions pas dans une réunion interreligieuse de prières mais dans une messe catholique célébrant la conversion de Saül de surcroit. Or Paul a été considéré pendant des siècles comme le diviseur des Juifs et des Chrétiens. Le miracle ou la transmutation c’est qu’il puisse être considéré aujourd’hui comme un rassembleur…

Le secret de cette transmutation, c’est le pardon réciproque. Merci Dan de nous  pardonner ce qui a pu te faire violence dans nos mots insuffisamment « polis ». Merci pour ton enseignement. Si l’Assemblée t’a demandé de dire ta pensée au cours de l’homélie, c’était pour accueillir la bénédiction qui vient des Juifs.

C’est alors que tu nous dis : « Pour le peuple juif, le Messie n’est pas encore venu, il n’y a donc pas d’annonce de la Parole à la terre entière comme pour les Chrétiens.  Seul le cœur de l’homme peut être bon ou mauvais, la nature est toujours bonne.  Pour un Juif  la question n’est pas d’annoncer la Parole mais de se hisser au niveau de la nature qui est sainte.». Et encore : « l’expérience que nous faisons ensemble est nouvelle  et ne peut pas se dire avec des mots anciens ». Nous sommes ainsi appelés à « hisser la pensée au niveau de l’expérience ». C’est ce que j’appelle « polir » nos mots.

Voici sans doute une piste pour la fraternité hébraïque des Artisans de Paix appelée à entrer en dialogue avec la fraternité eucharistique des Artisans de Paix. Nous retrouvons en l’une et l’autre la perspective teilhardienne que la matière est Esprit. Voilà sans doute de quoi réjouir nos amis bouddhistes. Ceci ne peut se faire sans la remise confiante à Dieu dans la paix que signifie Islam au sens spirituel du terme. Notre perspective continue de s’inscrire dans le Projet Artisans de Paix voulu par Madeleine Frapier et nous saluons la présence parmi nous de son gendre, Edmond Lisle, actuel Président de la Fraternité d’Abraham.

Ainsi le 25 janvier est-il le jour de la célébration de l’accomplissement des Artisans de Paix   puisqu’il  est le jour de la fête de leur Unité ;  le 25 mars est celui de leur naissance parce qu’il célèbre le Chéma Israël avec l’accueil de l’ « inouï » de Dieu par une femme juive et que cette fête a été décrétée commune par les Chrétiens et les Musulmans dans ce pays symbole qu’est le Liban;  le 15 octobre  est le jour de leur promesse, celle des sept demeures spirituelles, parce qu’il est le jour de la fête de sainte Thérèse d’Avila. Marc Lebret m’a demandé de mettre par écrit ce que j’ai dit succinctement à ce sujet à l’issue de notre célébration. C’est donc pour lui et peut-être pour d’autres qui ont besoin de « voir » que j’écris ce parcours qui par grâce, a été validé par Olivier Rousseau o.c.d. et qui symbolise la Jérusalem céleste que nous sommes appelés à revêtir pour entrer avec plus de vérité dans la Jérusalem terrestre.

On entre dans la Cité de Paix par le désir (1ère demeure). Le don de l’Esprit qui l’accompagne et en est le signe est la guérison intérieure. Mais le désir est instable. Pour rester dans la Cité, il faut s’engager dans un combat spirituel (2nde demeure). Le don de l’Esprit qui en est le signe est la persévérance. La persévérance conduit à l’illumination au sens platonicien où la conscience passe derrière le miroir du monde, dans la lumière de la conscience (3ème demeure). Le don de l’Esprit qui va avec est celui de l’interprétation des langues. La possibilité de l’interreligieux naît ici. Peuvent alors surgir les trois qualités du Souffle primordial dans le corps de l’homme (4ème demeure). On en trouve la trace dans des traditions non monothéistes comme le Tao. Dans les traditions de la Révélation, elles expriment des noms de Dieu : ELOHIM (Dieu des Puissances) dont la force est incommensurable avec celle de l’homme qui ne peut la soutenir, ADONAÏ (YHWH) semblable à l’Agneau Immolé puisqu’il retient sa force dans le Buisson Ardent pour que celui-ci ne se consume pas et qu’il donne à l’homme sa Loi pour vivre en sa présence,  le NOM PROPRE par lequel chacun est appelé à faire offrande de sa vie, devenant ainsi témoin de l’Unique. Dans la tradition chrétienne, elles révèlent le nom qui se dit avec le SIGNE DE LA CROIX. Le don de l’Esprit qui va avec est celui de pouvoir faire des miracles : « Tout ce que vous demanderez en mon nom vous sera accordé ».  L’homme peut alors s’unir à Dieu, tout au moins dans la tradition de sainte Thérèse. Dans la 5ème demeure, c’est la volonté qui s’unit à Dieu le jour de l’élection. Le don de l’Esprit qui l’accompagne est celui de Prophétie. Dans la 6ème demeure, c’est l’intelligence qui s’unit à Dieu en devenant connaissance corporelle avec l’échange des cœurs, jour dit des fiançailles spirituelles dans la mystique nuptiale de Thérèse. Le don de l’Esprit qui va avec est  la Sagesse. La 7ème demeure est diurne alors que les précédentes sont nocturnes. Le mariage spirituel consacre l’union entre Dieu et l’homme : si Dieu est en l’homme au cœur de son désir, l’homme est en Dieu comme Artisan de Paix. Artisan inutile car l’Œuvre est Grâce.

 

Paula Kasparian, Présidente des Artisans de Paix


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