Lettre 27 - 14/7/2004


14 juillet, Fête Nationale



14 juillet : Fête Nationale. Notre pays célèbre son unité, rappelle sa belle devise de « Liberté Fraternité Egalité » et honore ses forces de défense et de sécurité qui, si elles ne sont plus issues de la conscription, du « service militaire » de naguère, n’en font pas moins partie intégrante de la nation.

En cet été, période de vacances pour les plus fortunés, d’isolement pour beaucoup d’autres, nous vivons en France dans un calme relatif mais inquiet, marqué au quotidien par des incidents racistes, anti-sémites, xenophobes et où le chômage de trop de jeunes et de moins jeunes rend tout le monde morose et désabusé. Les images qui nous viennent de nos voisins les plus proches ne sont pas faites pour rassurer : le Proche et le Moyen-Orient  continue d’être secoué de violences en Irak, en Afghanistan, en Israel, en Palestine, en Arabie Saoudite, en Tchéchénie, mais ces violences se déchainent aussi au Soudan, en Côte d’Ivoire, en Algérie et frappaient il y a peu, l’Espagne et la Turquie… L’élimination d’un tyran sous les coups d’une coalition  étrangère et la traque infructueuse d’un criminel insaisissable semblent avoir provoqué une metastase du terrorisme international. Face à ces violences, dans nos démocraties occidentales désemparées, qui ont trop souvent oublié leurs valeurs fondatrices, d’aucuns se plaisent à accuser l’islam d’être le véhicule du terrorisme. Et comme pour leur donner la réplique, dans les sociétés musulmanes du pourtour méditerranéen, dans des états fort peu démocratiques accablés par la misère et la corruption, trop de sermons fondamentalistes, même s’ils ne représentent qu’une opinion très  minoritaire, attisent avec succès la haine des «occidentaux, des croisés et des juifs » responsables de tous les maux de ces sociétés.

Notre Europe vient avec succès, quoique malheureusement dans une grande indifférence, de réussir son élargissement à l’est. Elle doit maintenant réussir l’intégration en profondeur de sa famille élargie, ce qui demandera du temps et de la persévérance. Mais elle doit dans le même temps se préoccuper de ce qui se passe à ses portes, au Proche et au Moyen Orient pour y intervenir avec toutes les ressources de sa diplomatie et de sa puissante économie pour aider cette région à construire une paix durable fondée sur le respect mutuel de ses peuples et sur des intérêts communs partagés, à l’image de la pacification et de la reconstruction européenne des cinquante dernières années.

Tout en poussant les responsables politiques de l’Europe tout entière à œuvrer dans cette voie en notre qualité de citoyens de l’Europe élargie, que pouvons nous faire individuellement et collectivement pour promouvoir la paix autour de nous et de proche en proche, jusqu’aux extrémités de la terre, afin de mériter le nom d’Artisans de Paix ?

Le premier devoir est de persévérer dans nos efforts pour mieux connaître l’Autre, celui ou celle, voisin proche ou inconnu éloigné, qui n’appartient pas à notre communauté ethnique, nationale, religieuse, ne pratique pas – ou mal – notre langue, ne partage pas notre histoire et notre culture, en bref l’Etranger et tout d’abord celui qui vit parmi nous.

Pour nous Européens, de tradition juive ou chrétenne ou athées ou agnostiques se réclamant de la tradition des Lumières, le plus urgent est sans doute de mieux connaître et comprendre l’Islam. Juifs ou Chrétiens nous disons que nous partageons avec nos frères musulmans un ancêtre commun en Abraham, mais au-delà de cette profession de foi, quel grave déficit de connaissance et donc de respect réciproques : car une méconnaissance comparable de l’héritage juif, chrétien et de la philosophie des Lumières habite nos compatriotes musulmans.

Notre premier devoir d’Artisans de Paix est d’œuvrer pour combler ce déficit. Au terme de quinze sessions de travail en deux ans à Paris, Mazille et Cluny notre programme « Une Europe en mutation au carrefour des civilisations » a permis un approfondissement certain de l’apport de chacune des trois religions du Livre à l’héritage commun de l’humanité. La liste des communications écrites préparées pour ces sessions sera diffusée à la rentrée et les textes souhaités seront disponibles contre le remboursement des frais de reprographie et de port.

Au-delà de ce premier cycle, nous devons préparer la suite. En plus de conférences à Paris, une séance de travail sera organisée au Caire en 2005, suivie d’une période de recueillement au Sinaï.

Dès à présent nous pouvons vous annoncer le 11 décembre de 14h.30 à 18h.30 au Centre Sèvres un colloque sur le thème « Islam et évolution » organisé en partenariat avec l’Association des Amis de Pierre Teilhard de Chardin.

Bon été à tous.

 

Edmond LISLE, Président


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